“Seigneur, tu m’as séduit, et j’ai été séduit.”
J’imagine bien la « Une » de la presse à sensation, de la presse à scandale : « Jésus annonce à ses disciples qu’il va monter à Jérusalem où il va souffrir, être mis à mort et ressusciter le troisième jour ! ». Ne faut-il pas être un peu fou pour dire des choses pareilles ? Nous comprenons facilement la réaction de Pierre : « Dieu t’en garde, Seigneur ! cela ne t’arrivera pas. » (Matthieu 16,22) Et nous connaissons la fin de l’histoire : Jésus va monter à Jérusalem où il va souffrir, être mis à mort et ressusciter le troisième jour.
J’imagine bien la suite de l’article : « en plus, Jésus invite celles et ceux qui veulent le suivre à renoncer à eux-mêmes et à prendre leur croix… ». Ceci n’est pas très vendeur de la part de Jésus. Il aurait pu en rester simplement à « aimez-vous les uns les autres!». C’est une valeur plus sûre ! C’est une valeur plus facile à vivre. Oui mais… Jésus ne nous invite pas à vivre uniquement avec des valeurs. Le baptisé ne peut pas se contenter de vivre des valeurs. Il doit devenir disciple, c’est-à-dire se laisser enseigner par Jésus lui-même et prendre exemple sur le maître. Jésus nous enseigne la seule et unique voix de l’amour qui soit : celle du don de soi. Aimer, c’est tout donner et se donner soi-même.
Baptisé, disciple de Jésus, il nous faut emprunter le même chemin que le Christ. Pour cela, comme Pierre, dans l’évangile de dimanche dernier, il est important que nous prenions le temps de répondre à la question que Jésus nous pose : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » (Matthieu 16,15). Ne faisons pas une réponse toute faite, apprise au catéchisme, prenons le temps de formuler une réponse personnelle. Ensuite, avec Pierre, nous pourrons professer : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant!» (Matthieu 16,16) Cette première étape, nous permettra d’avancer un peu plus à la suite du Christ.
Comme pour Pierre, il nous faudra ensuite vivre le baptême du feu, celui de l’accueil de l’Esprit-Saint afin de pouvoir donner entièrement notre vie au Christ. Ce n’est qu’après avoir vécu notre pentecôte personnelle que nous aurons la force de marcher véritablement à la suite du Christ, de donner notre vie comme lui.
Pour cela, il nous faut entrer sur le chemin du prophète Jérémie : « Seigneur, tu m’as séduit, et j’ai été séduit ; tu m’as saisi et tu as réussi. » (Jérémie 20,7) Si le Seigneur veut nous séduire ce n’est pas pour nous manipuler et nous conduire sur un chemin de souffrance. Si le Seigneur veut nous séduire c’est pour que nous puissions nous laisser aimer librement et que nous puissions l’aimer en retour. En nous aimant, le Seigneur se donne totalement à nous. Il ne supprime ni le mal, ni la souffrance, il vient l’habiter avec nous, il vient y mettre le baume de son amour.
Sous l’effet de l’amour de Dieu, je n’ai d’autre désir que d’aimer en retour, de me donner à lui, de renoncer à moi-même, c’est-à-dire à mes désirs égoïstes, pour gagner la vie que le Seigneur veut me donner. Pour cela, répondons à l’invitation de Saint Paul : par la tendresse de Dieu, présentons lui nos corps, nos personnes en sacrifice vivant, saint (cf. Romains 12,1). Paul nous invite à offrir notre vie à Dieu pour en faire quelque chose de sacré, de saint à l’image de celui qui est l’auteur de la vie : Dieu lui-même ! En aimant, Dieu nous invite à entrer dans la dimension de don de soi. Celui-ci se manifeste dans la façon de vivre mon baptême et ma confirmation, à travers un choix de vie tel que le mariage ou l’ordination, à travers mon célibat qu’il soit choisi, subit ou d’attente avant de vivre un autre engagement…, à travers l’un ou l’autre engagements pris au cœur de la société ou/et pour ma formation chrétienne.
Vivre son baptême n’est donc pas vivre un baptême de salon dans la mondanité ! Mais c’est oser risquer ce don de Dieu pour le faire fructifier, pour le rendre saint c’est-à-dire à l’image de Dieu, habiter par l’Esprit Saint. Et moi, cette année que vais-je faire pour cela ? Chacun de nous a, au moins un point d’action : constituer une équipe synodale en réponse a l’appel de notre évêque. Pour cela, il nous faudra sortir un peu de notre confort et oser aller inviter des baptisés qui ont laissé dormir la grâce de leur baptême… Oui, en cette nouvelle année qui s’ouvre, réveillons la grâce de notre baptême, réveillons le don de Dieu qui est en nous… laissons nous séduire par le Seigneur : il veut notre bonheur ! Amen.