Appel et liberté

En cette période de l’année, il y a souvent comme un air de fête dans l’Église. C’est la période des ordinations. Et nous rendons grâce au Seigneur pour ce don qu’il nous fait. Quand une communauté chrétienne vit un tel évènement, on observe chez chacun une certaine effervescence. Souvent chacun admire celui qui a répondu à l’appel du Seigneur… avec parfois une petite pointe de jalousie: il a osé! Il a osé répondre à l’appel et par sa réponse, il a fait oeuvre de liberté.

Appel et liberté sont les deux maîtres-mots de la Parole de Dieu proclamée ce dimanche.

Dans la première lecture, nous avons l’appel d’Élisée par le prophète Élie. Cet appel retenti au coeur même de la vie quotidienne d’Élisée, dans son activité habituelle d’agriculteur. Cet appel surgit par un signe: Élie jette sur lui son manteau. Par ce geste Élie invite Élisée à participer à sa mission. Élisée répond à cet appel avec une grande liberté. Il prend le temps d’accomplir son devoir de fils. Dans un même temps, il suit Élie en acceptant le choix radical, la rupture qu’implique cet appel. Il se tourne résolument vers l’avenir.

Dans l’Évangile, nous avons trois rencontres faites par Jésus. Tout d’abord cet homme qui dit à Jésus: «Je te suivrai partout où tu iras.» (Luc 9,57) La réponse de Jésus est surprenante: au lieu de l’encourager à marcher à sa suite, Jésus lui décrit simplement les conditions matérielles de sa vie terrestre: «Les renards ont des terriers, les oiseaux du ciel ont des nids mais le Fils de l’homme n’a pas d’endroit où reposer sa tête.» (Luc 9,58)

Lors de la deuxième rencontre, c’est Jésus qui interpelle l’homme en lui adressant un simple: «Suis-moi» (Luc 9,59) Avant de répondre présent à l’appel, l’homme demande à pouvoir enterrer son père. Ceci nous parait, humainement, être une bonne réaction et pourtant Jésus l’invite en tout premier, non pas à enterrer son père mais à annoncer le règne de Dieu.

Pour le troisième homme rencontré, la réponse qu’il fait à Jésus ressemble à la réaction d’Élisée: avant de partir, celui-ci veut saluer ses parents. Jésus semble mettre une exigence plus grande que le prophète Élie. Il demande à son interlocuteur de ne pas regarder en arrière!

Comment se fait-il que Jésus, qui se montre doux envers les pêcheurs, soit très exigent avec ses disciples? Pour suivre Jésus, il faut savoir tout laisser. Il faut savoir abandonner nos habitudes, accepter les difficultés… Comme Jésus, il faut prendre «avec courage la route de Jérusalem» (Luc 9,51) Comme Jésus, il faut passer du confort de la maison familiale de Nazareth à la montée à Jérusalem.

Cette relation que Jésus exige d’avoir avec lui, n’est pas une relation inspirée par la sévérité. C’est une relation conduite par l’amour que Jésus exige de nous. Si dans le mariage, «l’homme quittera son père et sa mère pour s’attacher à sa femme» (Genèse 2,34; Marc 10,7), le disciple de Jésus quitte tout pour s’attacher à Lui. Notre relation au Christ doit être totalement différente que celle d’avec nos amis, nos parents: Jésus est le Fils de Dieu et par sa mort et sa résurrection, il nous entraine à une vie nouvelle. Il nous introduit dans une filiation nouvelle avec Dieu.

En échos à cet appel du Christ, entendons saint Paul: «Si le Christ nous a libérés, c’est pour que nous soyons vraiment libres. Alors tenez bon, et ne reprenez pas les chaines de votre ancienne esclavage.» (Galates 5,1.12) Par cet appel, Paul nous invite à regarder lui aussi vers l’avenir. Il nous invite à vivre «sous la conduite de l’Esprit de Dieu» afin de ne plus obéir «aux tendances égoïstes de la chair.» (Galates5,16)

La liberté d’aimer que nous offre le Christ n’est pas une autorisation au libertinage ou à une vie dissolue. La liberté que nous offre le Christ ne consiste pas à satisfaire notre égoïsme. Être disciple de Jésus c’est accepter d’entrer dans le combat pour se laisser guider par l’Esprit et non par la chair. Accepter de se laisser guider par l’Esprit, c’est entendre en nous ce désir d’union avec Dieu, de prière profonde, de charité, d’attention aux autres, de courage et de beauté morale. Accepter d’entendre l’appel du Christ et d’entrer sur ce chemin de liberté, c’est s’engager à aimer Dieu et notre prochain.

Demandons au Seigneur la grâce de répondre généreusement à son appel et d’entrer joyeusement sur ce chemin de liberté. Cela relève de la responsabilité de chaque baptisé afin que celles et ceux qui sont appelés à ne vocation plus particulière au service du Christ puissent y répondre généreusement et en toute liberté. Amen.

Homélie pour le 13ème dimanche ordinaire – Année C

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