« Béni soit Dieu, le Père de Jésus Christ Notre Seigneur : dans sa grande miséricorde, il nous a fait renaître grâce à la résurrection de Jésus Christ pour une vivant espérance… » (1P 1,3) venons-nous de lire dans la Première Lettre de Saint Pierre.
« Béni soit Dieu, le Père de Jésus-Christ Notre Seigneur » : c’est bien une grande prière de bénédiction qui peut monter de notre cœur en ce jour. Dieu, qui, par la vie de Jésus-Christ, s’est révélé à nous comme Père, nous offre ce qu’il a de plus précieux, ce qui le prend aux entrailles : sa miséricorde !
En ce dimanche, nous sommes invités, à la suite de Jean-Paul II, béatifié ce 1 mai, à célébrer la miséricorde divine. Mais encore faut-il comprendre ce qu’est la miséricorde !
En effet, bien souvent nous ne donnons pas à cette réalité tout le poids qu’elle mérite. Nous limitons trop souvent la miséricorde comme sensibilité à la misère d’autrui, ou la pitié à laquelle on pardonne au coupable. Or si nous prenons le temps de regarder ce qu’est cette réalité dans la bible, nous comprenons pourquoi Jean-Paul II nous invite à l’honorer de façon toute particulière le dimanche qui suit la résurrection de Notre Seigneur Jésus-Christ.
La miséricorde tire sa racine d’un mot hébreux qui signifie « entrailles ». Les « entrailles » étant, pour les hébreux, le siège de tous les sentiments. La miséricorde est alors un sentiment qui exprime l’attachement d’un être à un autre, la tendresse. La miséricorde désigne l’attachement qui unit Dieu à l’être humain comme si les « entrailles de Dieu » frémissaient en pensant à l’homme. C’est ainsi que Dieu s’émeut avec tendresse comme un père ou une mère à l’égard de son enfant.
Un autre terme hébreux accompagne souvent la miséricorde. A travers ce terme, il s’agit de la relation qui unit deux personnes et implique la fidélité et l’obligation de venir en aide. La miséricorde n’est pas qu’un instinct de bonté. Elle est une bonté consciente et voulue. Elle est réponse à un devoir intérieure, fidélité à soi-même. La personne qui agit avec miséricorde témoigne alors d’une grande fidélité à la relation qui l’unit à quelqu’un d’autre. Il en est ainsi de la miséricorde de Dieu.
Ainsi tout le plan d’amour de Dieu dans la Bible est miséricorde. Dieu manifeste dans toute l’Écriture Sainte, l’attachement qu’il a pour l’homme et la femme. Il fait tout pour que l’être humain comprenne, jusque dans son refus de Dieu, l’amour que Dieu lui donne gratuitement. Cette miséricorde se manifestera jusqu’à l’incarnation du Verbe en Jésus-Christ. Le Christ se faisant homme donnera sa vie par amour pour nous sur la croix. C’est à travers le cœur du Christ crucifié que la miséricorde atteint tous les hommes.
« Cette miséricorde, le Christ la diffuse sur l’humanité à travers l’envoi de l’Esprit qui, dans la Trinité, est la Personne-Amour. Et la miséricorde n’est-elle pas le “second nom” de l’amour (cf. Dives in misericordia, n. 7), saisi dans son aspect le plus profond et le plus tendre, dans son aptitude à se charger de chaque besoin, en particulier dans son immense capacité de pardon ? » nous dit Jean-Paul II dans son homélie du 30 avril 2000.
Comme la Parole de Dieu de ce jour nous donne d’accueillir cette miséricorde ? Laissons parler le bienheureux Jean-Paul II : « Comme les Apôtres autrefois, il est toutefois nécessaire que l’humanité d’aujourd’hui accueille elle aussi dans le cénacle de l’histoire le Christ ressuscité, qui montre les blessures de sa crucifixion et répète: « Paix à vous ! » Il faut que l’humanité se laisse atteindre et imprégner par l’Esprit que le Christ ressuscité lui donne. C’est l’Esprit qui guérit les blessures du cœur, abat les barrières qui nous éloignent de Dieu et qui nous divisent entre nous, restitue la joie de l’amour du Père et celle de l’unité fraternelle. » (ibid). Il poursuit un peu plus loin : « Dans les diverses lectures, la liturgie semble désigner le chemin de la miséricorde qui, tandis qu’elle reconstruit le rapport de chacun avec Dieu, suscite également parmi les hommes de nouveaux rapports de solidarité fraternelle. Le Christ nous a enseigné que “l’homme non seulement reçoit et expérimente la miséricorde de Dieu, mais aussi qu’il est appelé à “faire miséricorde” aux autres : “Bienheureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde” (Mt 5, 7)” (Dives in misericordia, n. 14). Il nous a ensuite indiqué les multiples voies de la miséricorde, qui ne pardonne pas seulement les péchés, mais répond également à toutes les nécessités de l’homme. Jésus s’incline sur toute forme de pauvreté humaine, matérielle et spirituelle. »
La première lecture, tirée du Livre des Actes des Apôtres, nous invite à vivre cette miséricorde au cœur même de notre communauté paroissiale. En étant assidu à l’enseignement des Apôtres, (à nous laisser catéchiser), à vivre en communion fraternelle, (c’est à l’amour que nous aurons les uns pour les autres que l’on nous reconnaîtra disciples du Christ), à la fraction du pain (à l’Eucharistie), et à la prière commune (en louant le Seigneur), nous serons signe de la miséricorde de Dieu pour l’humanité. En effet : « la miséricorde du cœur est devenue également un style de rapports, un projet de communauté, un partage de biens. Ici ont fleuri les “œuvres de miséricorde” spirituelles et corporelles. Ici, la miséricorde est devenue une façon concrète d’être le “prochain” des frères les plus indigents. » (ibid)
« Béni soit Dieu, le Père de Jésus Christ Notre Seigneur » pour nous avoir donner un témoin de cette miséricorde dans notre monde d’aujourd’hui. Oui, béni soit Dieu pour le don qu’il nous a fait en Jean-Paul II afin que nous redécouvrions cet appel à l’amour de Dieu, cet appel à la miséricorde. Car, « c‘est de cet amour que l’humanité d’aujourd’hui doit s’inspirer pour affronter la crise de sens, les défis des besoins les plus divers, en particulier l’exigence de sauvegarder la dignité de chaque personne humaine. Le message de la divine miséricorde est ainsi, de façon implicite, également un message sur la valeur de chaque homme. Chaque personne est précieuse aux yeux de Dieu, le Christ a donné sa vie pour chacun, le Père fait don à tous de son Esprit et offre l’accès à son intimité.
Ce message réconfortant s’adresse en particulier à celui qui, touché par une épreuve particulièrement dure ou écrasé par le poids des péchés commis, a perdu toute confiance dans la vie et est tenter de céder au désespoir. C’est à lui que se présente le visage doux du Christ, c’est sur lui qu’arrivent ces rayons qui partent de son cœur et qui illuminent, réchauffent, indiquent le chemin et diffusent l’espérance. » (ibid)
« Jésus, j’ai confiance en toi ! » Amen.
Homélie pour le deuxième dimanche de Pâques – année A
Béatification de Jean-Paul II