Dur, dur d’être chrétien ! Combien de fois n’avons-nous pas l’impression de gémir « dans les douleurs de l’enfantement » comme le dit saint Paul aux Romains. Vivre le contraste entre la réalité du quotidien et l’espérance chrétienne n’est pas chose facile. Il existe une tension « entre les souffrances du temps présent et la gloire que Dieu va bientôt révéler en nous. » (Rm 8,18).
Cette souffrance et la « dégradation inévitable » sont entrées dans le monde comme une conséquence inévitable du péché. Elles sont le résultat d’une parole mensongère et destructrice, une parole mortifère, dont résulte la culture de mort, pour reprendre l’expression du bienheureux Jean-Paul II, qui nous entoure aujourd’hui. Cette parole destructrice s’oppose au travail de la Parole créatrice qui n’a d’autre désir que de nous ouvrir à la grâce structurante de Dieu, à la vie même de Dieu. Comment vivre avec le cri de cette souffrance qui est en nous ?
Prenons conscience que « nous avons commencé par recevoir le Saint-Esprit » (Rm 8,23) et que le Saint-Esprit est don de Dieu offert qui nous rend capable d’accueillir la Parole de Dieu. Et la Parole de Dieu a une action efficace et féconde en nous. C’est à cette espérance que nous ouvre, aujourd’hui, le prophète Isaïe : « Ainsi parle le Seigneur : La pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer, pour donner la semence au semeur et le pain à celui qui mange ; ainsi ma parole, qui sort de ma bouche, ne me reviendra pas sans résultat, sans avoir fait ce que je veux, sans avoir accompli sa mission. » (Isaïe 55,10-11).
Et cette Parole est semée à profusion ! Cette Parole est semée avec grande générosité ! Viendrait-il à l’idée d’un agriculteur de semer son blé sur le chemin, dans les fossés, dans les endroits rocailleux ou plein de ronces ? Certainement pas ! Dieu, dans sa grande bonté, sème à profusion les semence de sa Parole afin que nous puissions tous en avoir une part. Il sème à profusion pour être sur qu’il y en tombera dans la bonne terre de nos vies et que là, sa Parole pourra germer et porter du fruit. Oui, le Père sème dans la terre de nos vies le bon grain de sa Parole : son Fils Jésus-Christ.
Devant la générosité et la patience de Dieu, comment accueillir cette Parole dans ma vie ? En essayant de repérer les pierres, les ronces de ma vie qui font obstacle à cette Parole, qui m’empêche d’avancer à la rencontre de Jésus. Qu’est-ce que la Parole de Dieu m’invite à changer dans ma vie ? Qu’est-ce que je peux mettre concrètement en œuvre de cette Parole ?
Alors que nous sommes dans un temps de vacances, ré-entendons l’invitation de Benoît XVI aux pèlerins francophones lors de l’Angélus de dimanche dernier : « Il ne s’agit pas de partir en repos pour partir, mais bien de vivre d’une façon nouvelle nos relations avec nos proches, avec Dieu, en prenant du temps pour cela. Jésus nous invite à venir à Lui, à nous confier à Lui. La foi en sa présence nous apporte la sérénité de celui qui se sait toujours aimé du Père. Faisons une large place à la lecture de la Parole de Dieu, particulièrement de l’Évangile que vous ne manquerez pas de mettre dans vos bagages de vacances ! »
Oui, ce temps de vacances est un moment privilégié pour nous laisser travailler par la semence de la Parole de Dieu : par sa lecture, par sa méditation, par le partage de cette Parole avec ceux qui m’entoure. Pourquoi ne pas prendre un temps de la semaine pour lire et partager, en famille, l’évangile du dimanche suivant ?
C’est dans la mesure où nous prendrons le temps de laisser la Parole de Dieu porter du fruit en nous que nous pourrons la semer autour de nous. C’est dans la mesure ou nous mettrons tout en œuvre pour que notre vie soit une bonne terre où la Parole de Dieu pourra germer et porter du fruit en abondance que nous accueillerons le bonheur que Dieu nous offre.
Je ne peux terminer cette homélie sans avoir une pensée toute particulière pour celles et ceux qui ont la mission de semer avec générosité la semence de la Parole de Dieu : les éducateurs de la foi, et en premier lieu les parents. En effet, « cette parabole est réconfortante pour les adultes à la nuque raide que nous sommes, mais elle apporte aussi consolation et bon conseil à tous ceux qui sont en charge de catéchèse auprès des adolescents et des jeunes.
Quelle souffrance pour bon nombre de parents de voir leurs enfants délaisser la foi de leur enfance ! Mais la foi ne se transmet ni avec les chromosomes ni avec le lait de la nourrice : nous pouvons proposer à nos enfants l’amitié de Jésus, mais nous ne pouvons pas l’accepter à leur place ni la leur imposer.
Notre-Seigneur ne nous demande pas l’impossible : contentons-nous de faire comme lui, et de semer abondamment par la parole et par l’exemple, même dans l’apparente indifférence ; il en restera toujours quelque chose et le grain semé poussera en temps voulu ; car « la parole, qui sort de la bouche du Seigneur, ne lui reviendra pas sans résultat, sans avoir fait ce qu’il veut, sans avoir accompli sa mission » (1ère lecture).
Notre souci doit être de préparer la terre à recevoir le grain, puis de la nourrir afin qu’elle puisse produire l’épi. Pour cela nous sommes invités à arracher – autant que faire se peut – les mauvaises herbes et nourrir le sol de l’engrais des vertus, en particulier par l’exemple d’une vie évangélique vécue dans la paix et la joie. » (Père Joseph-Marie, fsj). Amen
Homélie pour le 15ème dimanche ordinaire – Année A