Communiquer, informer… Grâce aux nouvelles technologies et avec Internet, il n’a jamais été aussi facile de s’informer et de communiquer. « Les moteurs de recherche et les réseaux sociaux sont le point de départ de la communication pour beaucoup de personnes qui cherchent des conseils, des suggestions, des informations ou des réponses » constate Benoit XVI dans son message pour la 46ème Journée Mondiale des Communications Sociales. Internet est aujourd’hui le lieu des questions et des réponses. Et avec cet outil merveilleux nous pouvons espérer trouver les réponses à nos questions. Mais cela peut aussi susciter des questions existentielles que nous ne nous serions peut être jamais posées ! C’est aussi un lieu où nous pouvons être soumis à des besoins que nous n’aurions peut être pas eu autrement.
Quelles questions nous posons-nous dans ce monde complexe et varié de la communication ? « L’attention d’un grand nombre se concentre sur les questions ultimes de l’existence humaine : Qui suis-je ? Que puis-je savoir ? Que dois-je faire ? Que puis-je espérer ? » souligne le Saint Père. Il poursuit quelques lignes plus loin : « Ce flux incessant de questions manifeste, au fond, l’inquiétude de l’être humain toujours à la recherche de vérités, petites ou grandes, qui donnent un sens et une espérance à l’existence. L’homme ne peut se contenter d’un simple et tolérant échange d’opinions sceptiques et d’expériences de vie : tous, nous sommes des chercheurs de vérité et partageons ce profond désir, spécialement à notre époque où « lorsque les personnes s’échangent des informations, déjà elles partagent d’elles-mêmes, leur vision du monde, leurs espoirs, leurs idéaux ». »
Pour nous aider à répondre à ces questions, le pape nous invite à « considérer avec intérêt les diverses formes de sites, d’applications et de réseaux sociaux qui peuvent aider l’homme d’aujourd’hui à vivre des moments de réflexion et d’interrogation authentique ». Que ce soit Twitter, Carpe Deum ou d’autres, la substance des brefs messages que l’on peut y laisser et qui, souvent, ne sont pas plus long qu’un verset biblique, « on peut exprimer des pensées profondes ».
Cependant, cette communication ne doit pas nous faire oublier un point essentiel pour notre vie : cultiver notre propre intériorité. Ceci, nous pourrons le faire à la mesure où nous laissons une place au silence. Là est le cœur du message de Benoit XVI : il nous rappelle que le silence fait partie de la communication : « Le silence fait partie intégrante de la communication et sans lui aucune parole riche de sens ne peut exister. »
Le silence a d’abord un effet bénéfique pour nous-mêmes. Il permet de mieux se connaître soi-même. « Dans le silence nous écoutons et nous nous connaissons mieux nous-mêmes ; dans le silence, la pensée naît et s’approfondit, nous comprenons avec une plus grande clarté ce que nous voulons dire ou ce que nous attendons de l’autre, nous choisissons comment nous exprimer. ».
Le silence permet aussi à l’autre d’exister : « Se taire permet à l’autre personne de parler, de s’exprimer elle-même, et à nous de ne pas rester, sans une utile confrontation, seulement attachés à nos paroles ou à nos idées. »
Dans la communication, le silence ouvre alors un espace où peut se réaliser un échange. « Ainsi s’ouvre un espace d’écoute mutuelle et une relation humaine plus profonde devient possible. Dans le silence, par exemple, se saisissent les instants les plus authentiques de la communication entre ceux qui s’aiment : le geste, l’expression du visage, le corps comme signes qui révèlent la personne. Dans le silence, la joie, les préoccupations, la souffrance parlent et trouvent vraiment en lui une forme d’expression particulièrement intense. Le silence permet donc une communication bien plus exigeante, qui met en jeu la sensibilité et cette capacité d’écoute qui révèle souvent la mesure et la nature des liens. »
Le silence permet d’accueillir l’information et de discerner l’importance de ce qui a été dit : « Là où les messages et l’information sont abondants, le silence devient essentiel pour discerner ce qui est important de ce qui est inutile ou accessoire. Une réflexion profonde nous aide à découvrir la relation existante entre des événements qui à première vue semblent indépendants les uns des autres, à évaluer, à analyser les messages ; et cela permet de partager des opinions pondérées et pertinentes, donnant vie à une connaissance authentique partagée. Il est donc nécessaire de créer une atmosphère propice, comme une sorte d’« écosystème » qui sache équilibrer silence, parole, images et sons. »
Le silence est aussi le lieu de la Révélation. « Dans les différentes traditions religieuses, la solitude et le silence [sont] des espaces privilégiés pour aider les personnes non seulement à se retrouver elles-mêmes mais aussi à retrouver la Vérité qui donne sens à toutes choses. ».
Benoit XVI va alors expliquer comment Dieu se communique. « Le Dieu de la révélation biblique parle également sans paroles : « Comme le montre la croix du Christ, Dieu parle aussi à travers son silence. Le silence de Dieu, l’expérience de l’éloignement du Tout-Puissant et du Père est une étape décisive du parcours terrestre du Fils de Dieu, Parole incarnée. (…) Le silence de Dieu prolonge ses paroles précédemment énoncées. Dans ces moments obscurs, il parle dans le mystère de son silence » (Exhortation apostolique postsynodale, Verbum Domini, 30 septembre 2010, n. 21). Dans le silence de la Croix, l’éloquence de l’amour de Dieu vécu jusqu’au don suprême, parle. Après la mort du Christ, la terre demeure en silence et le Samedi Saint, lorsque « le Roi dort et le Dieu fait chair réveille ceux qui dorment depuis des siècles » (cf. Office des Lectures du Samedi Saint), résonne la voix de Dieu remplie d’amour pour l’humanité. »
Le silence est aussi, dans cette relation avec Dieu, le lieu où je peux lui parler. « Si Dieu parle à l’homme aussi dans le silence, de même l’homme découvre dans le silence la possibilité de parler avec Dieu et de Dieu. « Nous avons besoin de ce silence qui devient contemplation et qui nous fait entrer dans le silence de Dieu pour arriver ainsi au point où naît la Parole, la Parole rédemptrice. » (Homélie du Pape Benoît XVI à la concélébration avec la Commission Théologique Internationale, Chapelle Redemptoris Mater, 6 octobre 2006). Pour parler de la grandeur de Dieu, notre langage se révèle toujours inadéquat et ainsi s’ouvre l’espace de la contemplation silencieuse. De cette contemplation naît dans toute sa force intérieure l’urgence de la mission, la nécessité impérieuse « de communiquer ce que nous avons vu et entendu », pour que tous soient en communion avec Dieu (cf. 1 Jn 1,3). La contemplation silencieuse nous immerge dans la source de l’Amour, qui nous conduit vers notre prochain, pour sentir sa douleur et lui offrir la lumière du Christ, son Message de vie, son don d’amour total qui sauve. »
Ainsi dans son message pour la 46ème Journée Mondiale des Communications Sociales, le pape Benoit XVI nous redit toute l’importance du silence pour mieux communiquer, au cœur même de notre société contemporaine mais aussi pour annoncer l’Évangile de Jésus Christ. Cette communication requiert un apprentissage. Il conclue son message par ces mots : « S’éduquer à la communication veut dire apprendre à écouter, à contempler, bien plus qu’à parler, et ceci est particulièrement important pour les acteurs de l’évangélisation : silence et parole sont les deux éléments essentiels et parties intégrantes de l’action de communiquer de l’Église, pour un renouveau de l’annonce du Christ dans le monde contemporain. »
Puissions-nous redécouvrir la valeur et l’importance du silence dans la communication.