Le signe de notre entrée en carême est ces cendres qui vont être imposées sur notre front. Elles expriment notre désir de pénitence, de conversion. Je vais les recevoir avec ces mots: « Convertissez-vous et croyez à l’Évangile » (Marc 1,15) Est-ce que ces cendres répandues sur ma tête vont être lourdes à porter? Non! Ce n’est pas un fardeau. Elles n’ont pas de poids. Le carême n’est pas un temps où nous allons nous charger de pénitences, d’efforts à faire et dont nous serons découragés dès demain matin! Le carême est un appel à la vie!
Oui, vous avez bien entendu: nous sommes appelés à la vie! Ces quarante jours qui s’ouvrent devant nous sont un engagement à nous laisser recréer par l’amour, la vie de Dieu… recréation qui culminera en la fête de Pâques et la Résurrection de Jésus. C’est donc un temps de grâce qui s’ouvre aujourd’hui. Comment accueillir ce temps de grâce? Comment entrer sur ce chemin?
Dans la première lecture, le prophète Joël nous invite à revenir au Seigneur de tout notre cœur: « Déchirez vos cœurs et non pas vos vêtements, et revenez au Seigneur notre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour. » (Joël 2,13) L’appel du prophète nous rappelle que la conversion n’est pas que dans les formes extérieures ou dans de vagues intentions. La conversion touche et transforme toute notre existence en commençant par notre cœur, notre conscience. Ainsi, au début de ce carême, regardons notre cœur, regardons notre vie intérieure et cherchons ce qui nous éloigne de Dieu, ce qui nous éloigne des autres.
Cette attitude, cette démarche spirituelle nous permettra de vivre l’invitation de l’apôtre Paul: « au nom du Christ, laissez-vous réconcilier avec Dieu. » (2 Corinthiens 5,20). Le carême nous invite à nous réveiller, à nous secouer. Pour cela, engageons-nous résolument sur le chemin de l’Évangile en vivant, sans ostentation, la prière, le jeûne et l’aumône.
« La prière, nous dit le pape François, est la force du chrétien et de toute personne croyante. Dans la faiblesse et dans la fragilité de notre vie, nous pouvons nous adresser à Dieu avec une confiance de fils et entrer en communion avec Lui. Face à tant de blessures qui nous font mal et qui pourraient endurcir notre cœur, nous sommes appelés à plonger dans la mer de la prière, qui est la mer de l’amour infini de Dieu, pour goûter sa tendresse. Le Carême est un temps de prière, de prière plus intense, plus prolongée, plus assidue, plus capable de se charger des nécessités de nos frères; une prière d’intercession, pour intercéder devant Dieu pour les nombreuses situations de pauvreté et de souffrance. » (Pape François, homélie pour le Mercredi des Cendres 2014)
Le jeûne n’est pas une pratique formelle qui nous fait nous sentir en règle parce que nous nous sommes privé de chocolat ou de gâteaux! « Le jeûne comporte le choix d’une vie sobre, dans son style ; une vie qui ne gaspille pas, une vie qui ne « met pas au rebut ». Jeûner nous aide à entraîner notre cœur à l’essentiel et au partage. C’est un signe de prise de conscience et de responsabilité face aux injustices, aux abus, en particulier à l’égard des pauvres et des petits, et c’est le signe de la confiance que nous plaçons en Dieu et dans sa Providence. » (Ibid.)
Enfin l’aumône est le signe de la gratuité. « Dans l’aumône on donne à quelqu’un dont on n’attend pas de recevoir quelque chose en échange. La gratuité devrait être l’une des caractéristiques du chrétien, qui, conscient d’avoir tout reçu de Dieu gratuitement, c’est-à-dire sans aucun mérite, apprend à donner aux autres gratuitement. Aujourd’hui, souvent, la gratuité ne fait pas partie de la vie quotidienne, où tout se vend et s’achète. Tout est calcul et mesure. L’aumône nous aide à vivre la gratuité du don, qui est la libération de l’obsession de la possession, de la peur de perdre ce que l’on a, de la tristesse de celui qui ne veut pas partager avec les autres son propre bien-être. » (Ibid.)
Alors entrons, avec joie, sur le chemin de vie qu’est le carême. Ce chemin nous pouvons l’emprunter avec confiance. Jésus nous y précède. N’ayons pas peur de le suivre. Tout au long du carême, faisons notre les mots de la prière du psalmiste: « Crée en moi un cœur pur, ô mon Dieu, renouvelle et raffermis au fond de moi mon esprit. (…) Rends-moi la joie d’être sauvé; que l’esprit généreux me soutienne. (…) Seigneur, ouvre mes lèvres, et ma bouche annoncera ta louange. » (Psaume 50,12.14.17) Oui, comme nous y invite saint Paul: en tant que coopérateurs de Dieu, ne laissons pas sans effet la grâce reçue de Lui!
Sur ce chemin de vie, joyeux carême à chacun!
Homélie pour le Mercredi des Cendres