«Qui pourra nous séparer de l’amour du Christ?» (Romains 8,35) demande l’Apôtre Paul. Rien de ce qui ressemble à une épreuve nous répond-il. N’est-ce pas un peu facile? L’épreuve vient souvent ébranler notre foi, notre relation à Dieu. Et pourtant, rien ne peut nous séparer de l’amour du Christ: c’est lui qui nous a aimé le premier et cet amour, il ne cesse de nous le donner, de nous le montrer. Par amour pour nous, Jésus est mort sur la Croix. Encore faut-il savoir accueillir cet amour au moment de l’épreuve mais aussi à chaque instant de notre vie.
Dans l’évangile de ce dimanche, Jésus s’en va dans un endroit désert, à l’écart. Il vient d’apprendre le martyre de Jean le Baptiste. Face à la mort brutale de ce proche, Jésus ressent le besoin de se mettre, dans le silence de la prière, face à son Père. C’est sous le regard de Dieu qu’il accueille cet événement. Ce temps de silence, ce temps à l’écart sera de courte durée. Il ne tient que le temps de la traversée du lac puisque, en débarquant, il trouve là une grande foule de gens qui l’attend.
Face à cette foule, Jésus est “saisi de pitié” (Matthieu 14,14). Cette expression signifie qu’il est littéralement remué aux entrailles. Il est remué au plus profond de lui-même par l’attente de cette foule. Cette foule, qui est au désert, (est-ce littéralement un désert où est-ce un désert spirituel, un désert affectif…?) Jésus ne la laisse pas seule. Il vient la nourrir. Et il nourrit la foule avec ce qu’on lui offre, avec l’offrande qui lui est faite: cinq pains et deux poissons. Qu’est-ce qu’une telle offrande pour nourrir une foule de 5000 personnes et encore, sans compter les femmes et les enfants nous dit Matthieu.
Cette offrande, qui peut nous paraître dérisoire, Jésus commence par la bénir: “levant les yeux au ciel, il prononça la bénédiction” (Matthieu 14,19). Il commence par reconnaître que cette offrande, apportée par la foule, est un don de Dieu. Et il demande, simplement, que ce don soit utilisé au service des affamés. C’est donc avec cette offrande que Jésus nourrit la foule. Et il la nourrit avec abondance puisque, à la fin, “on ramassa douze paniers pleins.” (Matthieu 14,20)
Par ce geste, préfiguration de celui de l’Eucharistie, Jésus nous montre combien son amour vient nous rejoindre. Il est touché jusqu’au plus profond de lui-même par les situation de détresses, les blessures de nos vies, nos déserts affectifs et ou spirituels. Si nous savons lui offrir, il viendra nous combler, nourrir notre soif d’être aimer à profusion. Quand Dieu donne, il donne à profusion.
Ne fermons pas notre cœur devant nos détresses, nos blessures, nos pauvretés, présentons-les avec confiance au Seigneur. Mettons-nous devant lui et offrons-lui ce que nous sommes. Comme la foule de l’évangile suivons Jésus, allons à lui, écoutons-le… et n’oublions pas de rendre grâce pour ce qu’il nous donne. C’est ainsi que rien nous pourra nous séparer de l’amour du Christ… car nous découvrirons alors qu’il nous a précédé en tout, que son amour nous attend… et quand je suis aimé, même au pied de la croix, je peux tout traverser pour accueillir un amour toujours plus grand.
Ce lieu où nous vivons cela est, par excellence, l’Eucharistie. J’y vais trouver le Seigneur, avec celles et ceux, qui, comme moi, le cherche. Je lui présente l’offrande de ma vie et je loue le Seigneur pour ce qu’il me donne: le pain venu du Ciel qui nourrit à profusion notre humanité, l’amour de Dieu qui rejoint mon désir d’être profondément aimé. C’est fort de cet amour, que je reçois dans l’Eucharistie, que je m’unis au Christ et que le Christ devient ma propre vie. Oui, rien ne pourra nous séparer de l’amour du Christ. Amen.
Homélie pour le 18ème dimanche ordinaire – Année A