Vite… toujours plus vite…
Alors que nous sommes de plus en plus pressés de voir le résultat de ce que nous entreprenons, alors que nous sommes dans un monde de l’instantané, de l’immédiat, nous sommes de plus en plus impatients de pouvoir prendre nos vacances ou nos RTT afin de pouvoir souffler, de pouvoir nous poser et d’éventuellement prendre un peu de recul.
La Parole de Dieu de ce dimanche, nous invite à une toute autre attitude : patience, attente et confiance.
Cette attitude est d’abord celle de Dieu à notre égard, à l’égard du monde. Dieu a semé du bon grain dans le champ de notre monde, dans le champ du cœur de l’homme. Et il n’a qu’un seul désir : que cette bonne graine puisse pousser, puisse germer.
Première bonne nouvelle : Dieu n’a pas semé le mal dans le cœur de l’homme. En effet, existe-t-il un jardinier assez fou pour semer en son jardin de la mauvaise herbe ? Comment Dieu, « qui prend soin de toute chose » (1ère lecture : Sagesse 12, 13), « qui est bon et qui pardonnes, plein d’amour » (Psaume 85(86)) aurait-il pu semer le mal et la souffrance dans le chef d’œuvre de sa création : l’homme et la femme ?
La parabole du bon grain et de l’ivraie nous apprend également que le mal et la souffrance ne viennent pas du cœur de l’homme ni de sa nature profonde. Deuxième bonne nouvelle ! Le mal est semé par un ennemi et celui-ci vient quand nous dormons !
Le bon grain, c’est-à-dire le bon, le bien, est semé à la lumière, en plein jour. L’ivraie, c’est-à-dire le mal, est semé, par l’ennemi, de nuit. Et ceci, nous en faisons l’expérience avec notre propre péché. C’est bien souvent quand nous dormons, quand nous relâchons notre vigilance, dans nos moments d’inconscience, que le péché s’infiltre en nous.
Faut-il arracher l’ivraie ? Notre première envie est bien sur d’ôter le mal, d’arracher cet ivraie. Surprise ! Jésus nous dit de laisser pousser les deux ensemble ! Comment comprendre ce paradoxe ?
Dans nos vies, comme dans le monde, il y a un mélange de bon et de mauvais, de douceur et de violence, d’amour et de non-amour, de solidarité et d’individualisme. Le péché et la grâce sont inextricablement mêlés en nous. Dans l’épître aux Romains, saint Paul nous avoue : « Je ne fais pas le bien que je voudrais faire et je commets le mal que je ne voudrais pas faire. » (Romains 7,19)
Ce n’est qu’au jour de la moisson que l’ivraie sera séparé du bon grain. C’est au jour de la moisson finale que l’ivraie sera jeté au feu. L’Amour de Dieu sera victorieux du mal et cette espérance habite au plus profond de nos cœurs, comme nous l’avons lu dans le livre de la Sagesse : « Tu as pénétré tes fils d’une belle espérance : à ceux qui ont péché tu accordes la conversion. » (Sagesse 12,19)
En voulant arracher l’ivraie, en voulant arracher avec violence ce qui est mauvais en nous, nous risquons d’arracher aussi ce qui est bon ! Dieu accepte de nous supporter imparfait… acceptons-le de nous-mêmes et de ceux qui nous entoure. Apprenons à vivre avec la patience même de Dieu.
Dieu voit le fond des cœurs, écrit saint Paul aux Romains. Laissons l’Esprit Saint venir au secours de notre faiblesse. Laissons-le intervenir pour nous par des cris inexprimables. L’Esprit Saint qui nous est donné, vient de Dieu et il nous entraîne dans son mouvement vers Dieu. En nous ouvrant à cette action de l’Esprit Saint dans la prière personnelle, la lecture de la Parole de Dieu, l’adoration, en vivant des sacrements, principalement de celui de l’Eucharistie et de la Réconciliation, nous pourrons alors apprendre à laisser croître en nous le bon grain. Nous découvrirons, conduit par l’action de l’Esprit Saint, que la petite graine de sénevé peut devenir un arbre immense. Ne désespérons pas ! Cela n’est pas un chemin impossible… en se laissant habiter par l’Esprit Saint, marqué d’une espérance folle en la miséricorde de Dieu, de grands pécheurs sont devenus de grands saints… alors pourquoi pas moi ? Amen.
Homélie pour le 16ème dimanche ordinaire – Année A