En ce cinquième dimanche de Carême, alors que nous nous rapprochons de la Semaine Sainte, l’Évangile nous offre encore un beau texte sur la miséricorde divine : la rencontre entre Jésus et la femme adultère.
A la lecture de l’évangile, il est facile d’imaginer la scène : Jésus ; la femme, traînée de force sur la place publique, exposée à la honte et à l’humiliation ; les scribes et les pharisiens avec leurs pierres à la main, prêts à lapider la femme en application de la loi de Moïse même si leur intention première est de mettre Jésus à l’épreuve.
Face à cette violence, que fait Jésus ? Il se penche et trace des signes sur le sol. Ce geste mystérieux est d’abord un refus d’entrer dans leur logique d’affrontement. Jésus prend son temps, il crée un espace de silence au milieu de leurs cris accusateurs. Puis, il se redresse et prononce cette phrase que nous connaissons tous : « Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre. »
Ces mots touchent la conscience de chacun. Du plus âgé au plus jeune, ils s’en vont, laissant tomber leurs pierres. Restent alors, face à face, Jésus et cette femme. « Femme, où sont-ils donc ? Personne ne t’a condamnée ? » – « Personne, Seigneur. » – « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, et désormais ne pèche plus. »
Ce dialogue est d’une simplicité bouleversante. En quelques mots, tout est dit de la miséricorde divine.
Alors que retenir de cet Évangile en ce temps de Carême ?
D’abord, il nous rappelle que nous sommes tous pécheurs. Lorsque Jésus invite celui qui est sans péché à jeter la première pierre, il nous invite à l’humilité. Combien de fois jugeons-nous sévèrement les autres, tout en étant indulgents envers nos propres fautes ? L’accusation des autres est souvent le moyen le plus sûr d’éviter de regarder nos propres manquements.
Ensuite, cet Évangile nous révèle le regard du Christ. Jésus ne nie pas le péché de cette femme. Il ne dit pas que ce qu’elle a fait est sans importance. Mais il refuse de la réduire à sa faute. Il voit en elle une personne, avec sa dignité intacte malgré sa chute. Ce regard qui restaure, qui relève, qui guérit, c’est le regard même de Dieu sur chacun de nous.
« Va, et désormais ne pèche plus. » Ces paroles sont à la fois un pardon et un appel. Le pardon n’est pas une simple amnistie qui effacerait le passé. Il est une libération qui ouvre un avenir. Jésus ne dit pas : « Ce que tu as fait n’est pas grave », mais « Tu peux vivre autrement ». La miséricorde n’est pas un blanc-seing pour continuer comme avant ; elle est l’invitation à une vie nouvelle.
En ce temps de Carême, alors que le sacrement de réconciliation va nous être proposé, cet Évangile nous rappelle le sens profond de cette démarche. Nous n’allons pas à confesse simplement pour être acquittés, mais pour rencontrer le Christ qui nous relève et nous appelle à la conversion.
Enfin, cet Évangile nous invite à être des témoins de la miséricorde. Dans un monde si prompt à juger, à condamner, à exclure, nous sommes appelés à imiter le Christ : ne pas fermer les yeux sur le mal, mais refuser de réduire une personne à ses actes, aussi répréhensibles soient-ils.
Le pape François nous rappelle souvent que l’Église doit être un « hôpital de campagne » qui soigne les blessures, plutôt qu’une douane qui contrôle et rejette. À l’image du Christ, soyons des artisans de miséricorde, capables de regarder au-delà des fautes pour voir la personne dans toute sa dignité.
En cette fin de Carême, laissons résonner en nous ces paroles du Christ : « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, et désormais ne pèche plus. » Accueillons-les comme adressées à chacun de nous personnellement. Et demandons la grâce de pouvoir les prononcer, à notre tour, envers ceux qui nous ont blessés. Amen.

