Quand la grâce nous précède…

Aujourd’hui, l’Église nous fait lever les yeux vers Marie, conçue sans péché, « comblée de grâce » dès le premier instant de sa vie. Cette fête ne parle pas d’abord de ce que Marie a fait, mais de ce que Dieu a fait pour elle. Avant tout mérite, avant tout choix, Dieu l’a aimée la première. Et Marie a laissé cette grâce travailler en elle.

L’Immaculée Conception est la preuve que Dieu prend l’initiative. Il nous aime avant même que nous pensions à Lui. Cela ne dépend pas de nos forces, de nos succès ou de nos limites. En Marie, Dieu montre ce qu’il veut faire dans chacune de nos vies : préparer un espace intérieur où son amour peut demeurer.

Dans un monde qui nous pousse à « mériter » notre valeur, la fête d’aujourd’hui nous dit : tu es aimé gratuitement, même avec tes fragilités, même avec tes blessures. Marie est pour nous le signe de la miséricorde de Dieu.

La salutation de l’ange Gabriel : « Je te salue, comblée de grâce, le Seigneur est avec toi. » (Luc 1,28) n’est pas qu’une simple politesse. Elle révèle l’identité profonde de Marie : celle en qui la grâce de Dieu habite pleinement depuis toujours. Avant même qu’elle dise oui, avant même qu’elle ne comprenne le projet de Dieu, elle était déjà préparée, façonnée par l’amour divin.

Mais ne nous trompons pas sur le sens de ce privilège : Marie n’est pas préservée du péché parce qu’elle le méritait. Elle a été rachetée comme nous tous, mais d’une manière unique : par anticipation. C’est en prévision des mérites de son Fils Jésus-Christ qu’elle a été sanctifiée dès sa conception. Elle est la première rachetée, la première bénéficiaire de la Croix.

Dans la Genèse, nous avons entendu le récit de la chute. Ève, tentée par le serpent, entraîne Adam dans la désobéissance. Le péché entre dans le monde, et avec lui la mort, la souffrance, la séparation d’avec Dieu. Mais Dieu ne se résigne pas. Dès ce moment tragique, il promet une victoire : « Je mettrai une hostilité entre toi et la femme, entre ta descendance et sa descendance » (Genèse 3,15) dit-il au serpent. Cette femme annoncée, c’est Marie. Là où Ève a dit non, Marie dira oui. Elle est la nouvelle Ève, celle par qui commence le relèvement de l’humanité.

Lorsque l’ange lui : « Sois sans crainte… » (Luc 1,30), Marie ne comprend pas tout mais elle fait confiance. « Voici la servant du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole. » (Luc 1,38) Ce oui n’est pas une obéissance aveugle mais l’adhésion libre et aimante d’une femme parfaitement libre. Cette liberté est le fruit de l’Immaculée Conception. Sans le poids du péché originel, sans ses inclinations mauvaises qui nous tirent vers le bas, Marie peut dire oui à Dieu de tout son être.

Que signifie ce mystère pour nous ? Marie n’est pas une exception qui nous éloigne de Dieu. Elle est un signe qui nous révèle notre propre vocation. Saint Paul nous le rappelle dans sa lettre aux Éphésiens : Dieu « nous a choisis, dans le Christ, avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints, immaculés devant lui, dans l’amour. » (Éphésiens 1,4) Oui, vous avez bien entendu : « saint et immaculés » ! Ce qui a été réalisé pleinement en Marie dès sa conception, Dieu le veut pour chacun de nous. 

Certes, nous ne sommes immaculés dès notre conception. Nous portons les blessures du péché, nous connaissons nos chutes et nos faiblesses. Mais par le baptême, nous avons été plongés dans la mort et la résurrection du Christ. Nous avons été purifiés, sanctifiés, rendus capables de vivre en enfants de Dieu. La sainteté n’est pas réservée à quelques privilégiés : elle est notre vocation à tous.

Marie vient nous rappeler cette vérité essentielle : la grâce est plus forte que le péché. L’amour de Dieu est plus puissant que nos misères. Là où le péché a abondé, la grâce a surabondé.

Alors regardons Marie. Regardons cette jeune fille de Nazareth, humble et disponible, qui accueille le projet de Dieu avec confiance. Elle nous montre le chemin. Comme elle, nous sommes appelés à nous laisser transformer par la grâce, à accueillir le projet de Dieu pour nous : être « saints et immaculés devant lui, dans l’amour. » (Éphésiens 1,4)

Que la Vierge Marie, l’Immaculée Conception intercède pour nous. Amen.


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A propos de moi

Prêtre du diocèse d’Amiens, je suis actuellement curé des paroisses Sainte Colette des Trois Vallées (Corbie) et Saint Martin de l’Hallue (Querrieu)