Aux armes, citoyens ! Aujourd’hui, entrons dans le combat de Dieu, les yeux fixés sur Jésus-Christ. Oui, les lectures de ce dimanche nous font voir un drame auquel nous ne pouvons échapper : un combat est en train de se jouer et il nous faut entrer dans celui-ci ! Quel est ce combat ?
D’un côté :« Par un seul homme, Adam, le péché est entré dans le monde, et par le péché est venue la mort, et ainsi, la mort est passée en tous les hommes, du fait que tous ont péché. » (Romains 5,12) De l’autre côté, « à cause d’un seul homme, par la faute d’un seul homme, la mort a régné, combien plus, à cause de Jésus-Christ et de lui seul, régneront-ils dans la vie, ceux qui reçoivent en plénitude le don de la grâce qui les rend justes. » (Romains 5,17)
Toute notre histoire est en tension entre ces deux évènements : le premier nous affecte de fait, le second est une participation gracieusement offerte au mystère de la Rédemption. Le combat de l’humanité,qui est aussi le combat de chaque être humain, est de choisir : rester du côté obscur de la force ou répondre à l’appel de l’amour de Dieu pour l’humanité, lui qui « modela l’homme avec la poussière tirée du sol » à qui « il insuffla dans ses narines le souffle de vie » pour que l’homme devienne un être vivant. (Cf. la première lecture : Genèse 2,7-9;3,1-7a)
Solidaire de l’humanité, Jésus a vécu ce combat au désert… et résistant à Satan, il « nous invite à renouveler notre décision définitive pour Dieu et à affronter avec courage la lutte qui nous attend pour lui demeurer fidèles » (Benoit XVI, audience générale du 9 mars 2011). Comme pour Adam, comme pour chacun de nous, le Diable tente Jésus par la même ruse, (mais là il va se prendre une claque magistrale!) il cherche à nous séparer de Dieu d’abord par l’appel du ventre, la mise à l’épreuve de la puissance divine puis par notre désir de domination, de pouvoir. Quelque soit la forme de la tentation que nous adresse le démon, celle-ci est toujours la même : « Vous serez comme Dieu ».
Quelles sont nos armes pour résister à ce persifflage de l’affreux cornu, qui n’a d’autres moyens que de ramper à nos pieds pour nous séduire ? Les armes pour ce combat nous sont données au baptême. Saint Paul nous les décrit dans l’épître aux Éphésiens (6,14-18) : « Tenez-vous donc debout, avec la Vérité pour ceinture, la Justice pour cuirasse, et pour chaussures le Zèle à propager l’Évangile de la paix ; ayez toujours en main le bouclier de la Foi, grâce auquel vous pourrez éteindre tous les traits enflammés du Mauvais ; enfin recevez le casque du Salut et le glaive de l’Esprit, c’est-à-dire la Parole de Dieu » et l’apôtre ajoute : « Vivez dans la prière et les supplications ; priez en tout temps, dans l’Esprit ; apportez-y une vigilance inlassable et intercédez pour tous les saints. »
L’entrée en Carême, le mercredi des Cendres, marque cette participation au combat spirituel, ce choix qui se présente à nous : choisir Dieu, c’est-à-dire choisir la vie ou choisir la mort. Le Carême nous prépare à livrer la bataille finale qui culmine dans la Passion et la Résurrection du Christ, c’est là que se réalise pleinement le don de nous-mêmes à Dieu, à l’image du don que le Christ fait de sa personne. Ce drame, nous le vivons à chaque Eucharistie.
Ce combat ne doit pas nous faire peur. Il est celui de toute vie. Le Christ l’a vécu pour nous, le Christ le vit avec nous. Il est cette Parole de Dieu, arme absolue dont nous devons user et abuser pour nous enraciner, nous ancrer dans cette amitié profonde et réelle avec Dieu. Tout notre combat réside donc à s’ouvrir sincèrement à la Parole de Dieu car « là où l’homme, même fragile et pécheur, s’ouvre sincèrement à la rencontre avec le Christ, là commence une transformation radicale: «mais à tous ceux qui l’ont accueilli, il a donné pouvoir de devenir enfants de Dieu» (Jn 1, 12). Accueillir le Verbe signifie se laisser modeler par lui afin d’être conforme au Christ, au «Fils unique qui vient du Père» (Jn 1, 13) par la puissance de l’Esprit Saint. Cela marque le début d’une nouvelle création. Naît alors la créature nouvelle, ainsi qu’un peuple nouveau. Ceux qui croient, ou mieux ceux qui vivent dans l’obéissance de la foi, «sont nés de Dieu» (Jn 1, 13), et sont rendus participants de la vie divine: ils sont fils dans le Fils (cf. Ga 4, 5-6; Rm 8, 14-17). » (Benoit XVI, Verbum Domini 50 (La Parole du Seigneur))
Ainsi, en vivant d’un cœur joyeux ce temps de Carême, dans le jeûne, la prière et le partage, puissions-nous laisser grandir en nous la seul faim qui peut rassasier totalement le cœur de l’homme. Laissons résonner en nous les paroles de la prière que nous adresserons au Seigneur à la fin de cette Eucharistie : « Le pain que nous avons reçu de toi, Seigneur notre Dieu, a renouvelé nos cœurs : il nourrit la foi, fait grandir l’espérance et donne la force d’aimer : apprends-nous à toujours avoir faim du Christ, seul pain vivant et vrai, et à vivre de toute parole qui sort de ta bouche. » Amen.
Homélie pour le 1er dimanche de Carême – Année A

