Aujourd’hui, nous nous tenons au pied de la Croix. Dans le silence et le recueillement de ce Vendredi Saint, nous contemplons ce mystère central de notre foi. Cette Croix, scandale pour certains, folie pour d’autres, est pour nous chrétiens la manifestation suprême de l’amour de Dieu. Entrons ensemble dans ce mystère avec foi et humilité.
I. La Croix, révélation de l’amour de Dieu
« Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique. » (Jean 3,16) Cette parole de l’Évangile de Jean nous accompagne aujourd’hui. Sur la croix se révèle le cœur même de Dieu. Non pas un Dieu lointain et impassible, mais un Dieu qui entre dans notre condition humaine jusqu’à en partager la souffrance ultime.
Ce que nous contemplons sur la Croix n’est pas d’abord un instrument de supplice, mais le signe de l’amour le plus grand. Sur la Croix, Dieu ne nous impose pas la souffrance – il la prend sur lui. C’est le paradoxe chrétien : dans ce moment de la plus grande faiblesse apparente se manifeste la puissance infinie de l’amour divin.
II. La Croix rejoint nos souffrances
Ce mystère de la Croix n’est pas une réalité lointaine ou abstraite. Il touche au plus profond notre condition humaine marquée par la souffrance. Qui parmi nous n’a pas connu l’épreuve de la maladie, le poids de la solitude, la douleur des séparations, l’angoisse face à l’avenir incertain ?
Sur la Croix, le Christ embrasse toutes ces souffrances. Comme l’avait annoncé le prophète Isaïe, il est vraiment ce Serviteur souffrant qui « portait nos souffrances… et nos douleurs ». La Croix nous dit que Dieu n’est pas indifférent à nos peines. Au contraire, il les connaît de l’intérieur. Aucune détresse humaine ne lui est étrangère.
Lorsque nous nous sentons abandonnés, rappelons-nous ce cri du Christ : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Psaume 21(22),2) Ce cri, Dieu lui-même l’a poussé dans notre humanité. Il a traversé nos déserts, nos nuits, nos doutes.
III. La Croix, chemin de pardon et de réconciliation
« Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Luc 23,34) Ces paroles prononcées sur la Croix nous révèlent une autre dimension de ce mystère : celle du pardon. La Croix est le lieu de la réconciliation entre Dieu et l’humanité.
Ce n’est pas la souffrance en elle-même qui nous sauve, mais l’amour parfait dont elle témoigne – un amour qui va jusqu’au bout, qui ne retient rien. Cet amour brise le cycle de la violence et de la vengeance. Il ouvre un chemin nouveau.
Aujourd’hui, nous sommes invités à accueillir ce pardon offert et à en devenir les témoins. La Croix nous appelle à nous réconcilier avec Dieu, avec les autres, avec nous-mêmes. Tout à l’heure, lorsque nous nous avancerons pour vénérer la Croix, laissons ce pardon nous rejoindre personnellement.
IV. La Croix, semence de vie nouvelle
Le Vendredi Saint n’est pas le dernier mot de notre foi. La Croix n’est pas la fin de l’histoire. Jésus lui-même nous avait prévenus : « Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s’il meurt, il porte beaucoup de fruit. » (Jean 12,24)
La Croix est comme cette semence jetée en terre. De cette mort jaillira la vie. C’est le mystère pascal que nous célébrons en ces jours saints. Nous ne sommes pas un peuple figé dans le Vendredi Saint, mais un peuple qui traverse le Vendredi Saint vers la lumière de Pâques.
Cette espérance, nous sommes appelés à la porter ensemble, comme Église. Dans un monde souvent marqué par le désespoir, nous témoignons que la mort n’a pas le dernier mot. La Croix du Christ nous enseigne que l’amour est plus fort que la haine, que la vie triomphe de la mort.
Conclusion
En ce Vendredi Saint, prenons le temps de contempler véritablement ce mystère de la Croix. Comme nous y invite le Pape François : « Regarde les bras étendus du Christ crucifié, laisse-toi sauver encore et encore. »(Message pour le Carême 2020)
Avant de poursuivre notre célébration, je vous invite à un bref moment de méditation silencieuse. Puis, nous nous avancerons pour vénérer la Croix – non comme un objet, mais comme le signe de cet amour infini qui nous sauve.
Que ce geste ne soit pas une simple tradition, mais l’expression de notre foi en Celui qui, par amour, a donné sa vie pour nous. Amen.

